Ce qui séduit d’abord, chez Nine Antico, ce sont les graphismes. Original, son noir et blanc elliptique semble à la fois découler de l’imagerie des années 1970 (impression renforcée par les vignettes arrondies en forme de vieux poste de télé et les hachures psychédéliques), et des vieilles poupées de nos parents, dont on voyait surtout les yeux et la bouche au milieu d’un visage arrondi. Quant au texte, si l’on pense d’abord être tombé sur un auteur qui se contente de nous raconter son enfance pour se complaire dans l’autofiction à la mode un peu facile, Nine Antico a vite fait de nous retourner.

Non seulement son ton est juste, et rien ici dans le ton ne sent le jeunisme forcé comme chez certains, mais ‘Le Goût du paradis’ parvient à allier une légèreté et une autodérision amusantes (pétries de questions existentielles adolescentes du genre “Comment séduire quand on a ni ses règles ni ses seins ?”) à des vraies problématiques, rarement abordées. La gêne d’être blanc, par exemple, que beaucoup de banlieusards ont connu, n’avait jamais été traitée avec autant de franchise et d’acuité, et Nine Antico parvient ici à faire un tableau de la jeunesse de banlieue comme jamais il n’a dû être fait auparavant. Alliant un vrai talent d’observation et une esthétique singulière, ‘Le Goût du paradis’ se démarque des publications du même genre.

Le Goût du paradis de Nine Antico

Editeur : Ego comme X
Publication :4/4/2008